20ème édition de l’hommage aux travailleurs engagés de La Réunion

Mis à jour le 11/11/2023
Samedi 11 novembre
12 heures au Lazaret – Grande Chaloupe

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les présidents d’associations
Mesdames et Messieurs

Je suis honoré d’être ici ce 11 novembre 2023 pour célébrer à vos côtés la date anniversaire des 20 ans de l’hommage rendus aux travailleurs engagés de La Réunion. Vous l’avez dit, il y a 20 ans en 2003 avait lieu la 1ʳᵉ édition organisée par la Fédération Tamoule de La Réunion.

A partir des années 2010, le département fédère cette commémoration autour d’un collectif pour la mémoire des engagés.

Comme pour d’autres commémorations réunionnaises importantes, le 20 décembre notamment, l’État doit être présent avec vous. Les cérémonies nationales, si elles sont nombreuses, ne permettent en effet pas de rendre hommage à l’histoire des outre-mer dans toutes leurs composantes.  C’est pourquoi j’ai tenu avec insistance à être personnellement présent à votre cérémonie.

Cette cérémonie est un moment de recueillement important et un travail de mémoire pour tous ces travailleurs engagés venus de continents lointains afin de suppléer le manque de main d’œuvre dans les plantations de canne à sucre, et qui ont été mis en quarantaine au Lazaret de la Grande Chaloupe, principal Lazaret de l’île, lieu d’arrivée et de passage de tous les voyageurs.

Leur histoire et celle de l’engagisme en général est liée à celle de la fin de l’esclavage et à l’histoire du peuplement de La Réunion. Elle ne doit pas être oubliée : leurs sacrifices - car ces travailleurs ont été exploités au maximum - et leur force morale ont joué un rôle fondamental dans la création du tissu social de l’île et donné naissance à ce département multiculturel. C’est cette valeur multiculturelle qui est mise à l’honneur aujourd’hui.

De 1863 à 1939 ce sont 41 148 engagés de l‘océan Indien qui arrivent, originaires entre autres d’Inde, de Chine, d’Afrique, de Madagascar et des Comores. Ils sont surveillés, soignés, vaccinés et se reposent de leur voyage avant de rejoindre les habitations sucrières. On sait dans quelles conditions difficiles et souvent indignes.

Avec le recul du temps, cette commémoration est l’occasion de contempler le chemin parcouru, les défis et les opportunités que les ancêtres ont relevés. Les descendants des engagés sont les Réunionnais d’aujourd’hui, attachés à leur île, leur culture, insérés dans la société et fiers de partager le « vivre-ensemble » qui caractérise notre île. Il s’agit là d’un équilibre, endémique et fragile, entre l’expression des cultures, le respect de l’autre, l’ouverture et la tolérance, sans lesquels il n’est pas de liberté commune.

Nous saluons aussi aujourd’hui un haut lieu de l’histoire complexe de La Réunion. L’intérêt du monde de la recherche et du département pour les bâtiments du Lazaret a abouti en 1998 à l’inscription aux titres des monuments historiques de la totalité des vestiges du lazaret n°1 sur le territoire de La Possession et du lazaret n°2 sur celui de Saint-Denis. 

Prenons conscience de l’exigence de responsabilité qu’impose cet héritage, en particulier pour l’État qui organisa d’abord l’esclavage, puis l’engagisme. Les valeurs républicaines et humaines qui nous unissent au XXIe siècle n’ont pas toujours existé et sont fragiles. Nous, héritiers de l’Histoire, devons les porter haut et loin. La liberté, l’égalité, et la fraternité ne sont jamais un acquis, ni une garantie. Elles restent toujours à défendre et à mettre en acte.

Cette célébration se veut aussi profondément spirituelle. La liberté de culte et la laïcité sont des principes fondamentaux dans notre République. En ce sens, je condamne fermement les actes commis à l’encontre de la communauté tamoule ces derniers jours. Ces faits, isolés mais répétés, marque de bêtise, d’ignorance et de mépris de l’autre, portent atteinte à nos valeurs, réunionnaises et françaises, celles du vivre-ensemble, du respect, de la tolérance, equi symbolisent tant cette cérémonie.

 

Vous l’avez compris, j’ai tenu à être parmi vous pour cet autre 11 novembre.

Le 11 novembre, partout en France chaque année, ici à La Réunion comme sur les autres terres de France, nous commémorons la signature de l’armistice par les représentants des alliés et des Allemands, dans la clairière de Rethondes, qui a fin aux combats de la Première Guerre mondiale en 1918 sur le front d'Europe occidentale.

Une date et deux cérémonies, qui nous rappellent la complexité de notre histoire et la coïncidence de faits historiques qui deviennent des symboles, mais aussi notre diversité et notre richesse historique en tant que Nation.

Au cours de la 1ère guerre mondiale, 14.000 Réunionnais sont partis au front, à 10.000 km de chez eux. 1.500 d’entre eux sont morts au combat.

Certains d’entre eux étaient des descendants d’esclaves, d’autres d’anciens maîtres ou de petits blancs ; plusieurs entre eux étaient des engagés, récemment arrivés sur le sol de France.

Pleinement Français, ils ont montré qu’ils l’étaient, et ô combien, en payant le prix ultime, le prix du sang.

C’est pourquoi, le 11 novembre, à La Réunion, nous célébrons deux fois notre histoire, une même histoire.

C’est pourquoi, le 11 novembre, nous devons, vous et moi, prendre part aux deux cérémonies.

Vive la mémoire des engagés.

Vive La Réunion.

Vive la République.

Vive la France !

Télécharger 20ème édition de l’hommage aux travailleurs engagés de La Réunion PDF - 0,79 Mb - 11/11/2023